De rien.
Citation:
Extradition
- Cf : Arrestation *, Enlèvement d’un justiciable à l’étranger* , Mandat d’arrêt européen* , Territorialité de la loi* .
- Notion. L’extradition est une procédure de caractère international, relative à des faits susceptibles de constituer une infraction pénale ou ayant déjà donné lieu à une condamnation pénale, par laquelle un « État requérant » demande à un « État requis » de lui livrer un l’individu, soit pour le juger, soit pour lui faire subir une peine.
Lombois (Droit pénal international) : L’extradition, accord entre État, est du domaine des relations internationales. C’est dire que les conditions ne peuvent en être réglées unilatéralement par chaque État, et que la décision, de la demander comme de l’accorder, est de la compétence du pouvoir exécutif.
L’affaire Pinochet (Encyclopédie Microsoft Encarta). Le 16 octobre 1998, sur la base d’un mandat d’Interpol présenté par le juge espagnol Baltasar Garzón, le général Pinochet est arrêté par la police britannique à Londres. À l’issue d’une procédure de 17 mois, la demande d’extradition vers l’Espagne déposée par le juge espagnol afin de juger l’ancien chef de la junte militaire pour les crimes de « génocide, terrorisme et incitation à la torture » et « disparitions » est finalement rejetée par le ministre britannique de l’Intérieur Jacques Straw en mars 2000. Alléguant que l’« état de santé [de Pinochet] ne permettrait un procès équitable dans aucun pays », il rend sa liberté à l’ancien dictateur, âgé de 84 ans, qui rentre au Chili.
- Droit positif. La procédure d’extradition peut être régie par une Convention internationale, telle la Convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957 (supplantée par le Mandat d'arrêt européen). Elle l’est à défaut par les art. 696 et s. C.pr.pén., qui ont remplacé une loi fondamentale du 10 mars 1927.
Voir : Loi du 10 mars 1927, sur l’extradition.
Cass.crim. 19 janvier 1982 (Bull.crim. n° 16 p.34) : Les traités d’extradition sont des actes de haute administration, intervenus entre deux puissances, que seules celles-ci peuvent, de concert, expliquer ou interpréter ; il n’appartient en aucune manière à l’autorité judiciaire de s’immiscer dans ces explications ou interprétations.
Conditions de fond. Les conditions de l’extradition varient d’une convention à une autre. On peut principalement noter qu’en principe la France n’extrade pas ses nationaux, mais les juge elle-même.
Huet et Koering-Joulin (Droit pénal international) : Alors que l’État requérant peut réclamer la remise de toute personne, même de l’un de ses ressortissants, il est de tradition (au moins continentale) que l’État requis n’extrade pas ses nationaux.
Cass.crim. 2 octobre 1987 (Gaz.Pal. 1988 I somm. 85) : Méconnaît les dispositions de l’art. 124 C. nation., la Chambre d’accusation qui a rejeté l’exception prise de ce que la personne dont l’extradition était demandée aurait acquis la nationalité française en application de l’art. 44 C. nation., alors que selon l’art. 124 du même Code il s’agissait d’une question préjudicielle obligeant le juge à surseoir à statuer jusqu’à ce que la question ait été tranchée par la juridiction civile compétente.
- Les réfugiés, eux non plus, ne peuvent être extradés (Convention de Genève du 28 juillet 1951).
Cons. d’État 1er avril 1988 (Gaz.Pal. 1988 II 549) : Les principes généraux du droit applicables aux réfugiés font en obstacle à ce qu’un réfugié soit remis, de quelque manière que ce soit, par un État qui lui reconnaît cette qualité, aux autorités de son pays d’origine.
- L’extradition d’un étranger ne saurait être demandée que pour une infraction grave, incriminée par les deux États, et à condition qu’elle ne puisse être considérée comme un Délit politique*.
Cons. d’État 27 juillet 1979 (Gaz.Pal. 1979 II 686) : Il n’est pas besoin que les qualifications des infractions soient formulées de façon identique dans les législations des deux pays.
Cons. d’État 3 juillet 1996 (DS 1997 SC 45) rappelle le principe fondamental reconnu par les lois de la République, selon lequel l’État doit refuser l’extradition d’un étranger lorsqu’elle est demandée dans un but politique.
Demande d’extradition. Si c’est la France qui est État requérant, la marche à suivre est la suivante : requête du Procureur de la République, transmission au procureur général, transmission motivée à la Chancellerie*, transmission au ministère des Affaires étrangères, transmission à l’État requis par voie diplomatique. La suite relève de l’État saisi.
Si c’est la France qui est État requis, la demande nous parvient par la voie diplomatique ; elle est transmise par le ministère des Affaires étrangère au ministère de la Justice. A supposer la demande recevable, la personne réclamée est immédiatement arrêtée et placée sous écrou extraditionnel, le procureur de la République l’interroge, puis le procureur général saisit la Chambre de l’instruction aux fins de contrôle de la légalité d’une éventuelle extradition.
Cass.crim. 3 mai 1994 (Bull.crim. n° 162 p. 370) : La demande d’extradition est authentifiée par la transmission du ministre des Affaires étrangères au Garde des Sceaux ; sa régularité ne peut donc être discutée.
Cass.crim. 16 janvier 2001 (Bull.crim. n° 9 p.19) : Une personne placée sous écrou extraditionnel ne peut soutenir qu’elle n’aurait pas été informée dans le plus court délai des raisons de son arrestation, dès lors que, le jour même de son incarcération, le procureur de la République lui a notifié le mandat d’arrêt pour l’exécution duquel son extradition a été demandée.
Arrestation de la personne réclamée. On considère habituellement que les circonstances de l'arrestation de l'individu recherché, souvent compliquées par des conflits de lois territoriales, sont indifférentes à ce stade de la procédure.
Cass.crim. 24 octobre 2007 (Bull.crim. n° 256 p.1057) : Lors de l'examen de la demande d'extradition, l'étranger est irrecevable à critiquer les conditions de son arrestation provisoire, celles-ci étant sans incidence sur la validité de la procédure d'extradition.
Procédure judiciaire d’extradition. La procédure devant la Chambre de l’instruction est de caractère accusatoire, et assure donc la protection des droits de la personne réclamée. Cette juridiction ne statue pas au fond mais rend un « avis » (susceptible de pourvoi en cassation).
Si cet avis est négatif, la demande d’extradition se trouve par là même rejetée de manière définitive. Si l’avis est positif au regard de la légalité, c’est au Gouvernement qu’il appartient de prendre la décision du point de vue de l’opportunité (dans le cadre de la Convention applicable).
Cass.crim. 31 mai 1988 (Gaz.Pal. 1989 I somm. 183) : Il résulte de l’art. 14 de la loi du 10 mars 1927 que la procédure instituée devant la Chambre d’accusation en matière d’extradition est essentiellement contradictoire et doit être suspendue en l’absence de l’étranger.
Cass.crim. 30 mai 1995 (Gaz.Pal. 1995 II Chr.crim. 446) : En matière d’extradition, l’audience de la chambre d’accusation est publique, à moins qu’il n’en soit décidé autrement sur la demande du ministère public ou du comparant.
Paris (Ch.acc.) 2 juillet 1980 (Gaz.Pal. 1981 I 97) : Il appartient à l’autorité judiciaire de l’État requis de contrôler la légalité et la régularité de la demande d’extradition dont elle est saisie.
Cass.crim. 10 juillet 1952 (Bull.crim. n° 183 p.308) sommaire : La Chambre d’accusation, saisie d’une demande d’extradition, ne peut donner un avis défavorable que si elle estime que les conditions légales ne sont pas remplies ou s’il y a erreur évidente.
Décision du pouvoir exécutif. Quand le Gouvernement décide d’accorder l’extradition, il rend un décret motivé d’extradition, signé par la Premier ministre et contresigné par le ministre de la Justice. Ce décret, qui ne préjuge par de la responsabilité pénale de la personne réclamée, est parfois assorti de réserves et de conditions ; il peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil d’État.
Cons. d’État 23 juin 1999 (Gaz.Pal. 2000 J somm. 1270) : Il résulte tant des principes généraux du droit français en matière d’extradition que de la Convention européenne d’extradition que, sauf erreur évidente, il n’appartient pas aux autorités françaises, lorsqu’elles se prononcent sur une demande d’extradition, de connaître de la réalité des charges pesant sur la personne réclamée.
Cons. d’État 15 octobre 1993 (Gaz.Pal. 1994 I 104) : Si l’un des faits à raison desquels l’extradition est demandée aux autorités françaises est puni de la peine capitale par la loi de la partie requérante, cette extradition ne peut être légalement accordée pour ce fait qu’à la condition que la partie requérante donne des assurances suffisantes que la peine de mort encourue ne soit pas prononcée ou ne sera pas exécutée.
Suites de l’extradition. Le décret d’extradition ordonne la remise de la personne réclamée à l’État requérant. Ce dernier pourra, selon les circonstances, soit lui faire purger sa peine si elle a déjà été condamnée, soit la juger mais sous les conditions prévues dans le décret et seulement pour les faits qui ont donné lieu à extradition (principe dit « de spécialité de l’extradition »).
Cass.crim. 12 juillet 1994 (Gaz.Pal. 1994 II Chr.crim. 705) : En vertu du principe de spécialité, l’individu qui aura été livré ne pourra être poursuivi ou jugé contradictoirement pour aucune infraction autre que celle ayant motivé l’extradition.
Cass.crim. 22 décembre 1969 (Gaz.Pal. 1970 I 91) : Le principe spécialité n’est pas applicable aux faits commis postérieurement à l’extradition.
- Lorsqu’il y a plusieurs États requérants, le délinquant est livré à celui contre lequel l’infraction était principalement dirigée. Le décret d’extradition peut alors prévoir une « réextradition » vers un État tiers pour être à nouveau jugé (sous réserve du principe « non bis in idem »).
Cons. d’État 15 juin 2001 (Gaz.Pal. 2002 J somm. 858) : Le Gouvernement, saisi de deux demandes d’extradition émanant l’une des autorités suisses, l’autre des autorités italiennes, a pu accorder l’extradition d’un ressortissant italien aux autorités suisses et italiennes, avec priorité au Gouvernement suisse et possibilité de réextradition ultérieure au profit du gouvernement italien.
http://ledroitcriminel.free.fr/dictionnaire/lettre_e/lettre_e_expr.htm