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Disons que d'une part, je ne pense pas qu'on veuille véritablement mourir en soit (tous courent au bonheur, même celui qui va se pendre, disait Pascal... ). Ce que l'on veut, c'est ne plus souffrir - physiquement ou moralement -, ne plus à avoir à affronter la vie, la maladie, la douleur, la solitude etc...
Je crois que ça va plus loin : une personne qui souffre se retrouve forcément amenée à faire le bilan de sa vie et à réfléchir à l'inanité de celle-ci de manière plus globale. La plupart des personnes qui ont une vie relativement heureuse et active ne comprennent pas le comportement des suicidaires parce qu'elles ne sont pas allées jusqu'à ce point de non retour où on réalise que nos activités quotidiennes ne servent fondamentalement à rien, si ce n'est à oublier la vanité de l'existence.
Aussi, je réitère la pensée que chacun dispose de sa vie comme il l'entend, parce que si une personne en arrive à réaliser que chacune de nos actions en ce monde restent vaines, la mort physique ne représente plus à ses yeux qu'un seuil symbolique à franchir.
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Après, je pense aussi qu'il faut voir un peu plus loin que "chacun fait ce qu'il veut de sa vie", et se demander pourquoi d'une part une personne souhaite mettre fin à ses jours, et quelle autre réponse on peut lui apporter. Et je reste persuadée que dans l'immense majorité des cas il y a une autre réponse, et que le suicide reste la solution de facilité, pas tant pour la personne qui souhaite mourir, mais surtout pour l'entourage et la société : parce que la mort serait moins coûteuse, moins coûteuse financièrement parlant (ben oui, des unités de soins palliatifs, des sortes de foyers, avec des moyens médicaux et personnels : infirmières, aides soignantes, médecins et psys formés et motivés, c'est probablement plus coûteux qu'une piqûre... ), mais aussi moralement : parce que le voisinage de la mort, dans notre société, reste un tabou.
Concrètement, il existe des milliers de personnes qui vivent seules, dans le dénuement le plus complet, et auxquelles il ne reste plus grand chose d'autre que l'option de mourir. Je vais paraître pessimiste, mais pour moi l'altruisme est un sentiment rare chez l'homme. Hier, à Lille, il y avait une jeune fille de mon âge tenant une pancarte sur laquelle il était simplement marqué : "j'ai faim". Personne ne lui adressait ne serait-ce qu'un regard. Pourquoi s'entêter à rêver de solutions, de systèmes d'entraide pour les personnes en détresse alors que l'être humain sera toujours un indécrottable égoïste ?
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Je trouve que le recours systématique à l'euthanasie ou au suicide assisté, c'est aussi une façon d'évacuer le débat vite fait bien fait, et ce n'est pas regarder la mort en face, justement.
Je ne partage pas ce point de vue. On ne peut pas se permettre de débattre pendant des siècles sur un sujet qui concerne la souffrance endurée par autrui. On peut débattre de la cause de l'extinction des dinosaures le temps qu'il faudra. Ca fait des millions d'années qu'ils ne souffrent plus. Mais pas sur un sujet comme celui-là. Je considère au contraire qu'il y a urgence.
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C'est l'illusion de le faire, mais au fond, regarder la mort en face c'est aussi prendre la fin de vie comme un temps dont la personne peut avoir elle aussi besoin pour faire le deuil d'elle-même, et pour les proches pour faire le deuil de la personne qu'ils sont en train de perdre. Et qu'une euthanasie trop "rapide" finalement, ça serait "voler" ce temps-là.
Surtout que de nos jours, nous avons les moyens médicamenteux de mettre fin à la plupart des douleurs, quitte à écourter la vie du malade.
Les personnes qui choisissent d'avoir recours au suicide assisté ont tout le temps dont elles ont besoin pour préparer leur départ dans les meilleures conditions. On n'euthanasie pas les gens à la va-vite mais avec tout le respect et l'encadrement qui leur est dû.
La plupart des moyens médicamenteux ne mettent pas fin à toutes les douleurs, puisque le suicide assisté est réclamé à corps et à cri depuis des années en France par nombre d'associations et de familles de grands malades.
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je pense que la personne qui se suicide, ou le tente, c'est d'abord une manière de demander du secours
Il y a une différence très nette entre la personne qui menace quotidiennement son entourage de ses intentions suicidaires et celle qui ne prévient personne, disparaissant du jour au lendemain, sans rien demander ni même parfois laisser un message...
L'appel au secours survient selon moi dans le premier cas de figure. Dans le second, la personne a la ferme intention de mourir.
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elle se trouve placée dans une situation où la mort devient la seule réponse... mais est-ce que si on lui en avait apporté une autre de réponse (qu'elle soit humaine ou médicamenteuse, ou autre... ), elle aurait mis fin à ses jours ?
On en revient à ce qu'on disait plus haut : concrètement, qui ferait preuve d'assez d'altruisme et de désintéressement pour sortir une personne qui lui est parfaitement inconnue de la détresse dans laquelle elle est plongée ?
Je suis pour le dialogue avec l'entourage, les amis, les médecins et tout ça.... Mais il y a des cas de figure où les mains sont lassées d'être tendues, ou d'autres pour lesquels aucunes ne se tendent.
Soyons réalistes.