PARIS (AFP) - Le sol de Mars contient des carbonates, mais seulement à l'état de traces et issus vraisemblablement de l'atmosphère de la planète, ont annoncé trois chercheurs américains, qui remettent ainsi en cause l'existence par le passé de mers et d'océans sur la "planète rouge".

Les quantités de carbonates détectées par un des instruments de la sonde américaine Mars Global Surveyor (MGS), en orbite depuis six ans autour de la planète, sont si faibles, affirment ces scientifiques de l'Université d'Etat d'Arizona (département de géologie) conduits par Joshua Bandfield, dans la dernière livraison de la revue Science, qu'elles ne peuvent provenir de vastes étendues d'eau.

Au vu notamment de certaines caractéristiques du relief martien révélées par les différentes sondes envoyées, ces dernières années, vers Mars, la cause semblait presque entendue : il avait dû exister à la surface de la planète, aux premiers temps de son histoire, du temps sans doute où elle possédait une atmosphère (aujourd'hui quasiment entièrement disparue), de vastes étendues d'eau : des mers et des océans.

Lancée à la fin de 1996 et arrivée dans le voisinage de la "planète rouge", MGS a entamé en 1997 sa mission : photographie du sol de Mars, étude de la topographie de la planète, de sa gravité, de la composition de son sol et de son atmosphère, du rôle de l'eau et de la poussière à sa surface et dans son atmosphère, de l'existence d'un champ magnétique et de son évolution.

En 2000, des clichés du sol de la planète prises par sa caméra, MOC (Mars Orbiter Camera), avaient fait sensation : planétologues et géologues y avaient lu de vastes traces d'écoulement d'eau, interprétation qui avait fini par être largement admise.

Ainsi, par le passé, le sol de Mars pouvait avoir connu de vastes mers et océans. Cette eau, expliquaient ces scientifiques, pourrait être en fait un écoulement en surface d'une eau venue du sous-sol de la planète. Et comme qui dit eau, dit potentiellement vie...

Cette eau est-elle encore présente dans le sol martien ? Oui, avaient répondu l'an dernier, également dans la revue Science, trois équipes internationales, après avoir analysé les données d'une autre sonde martienne américaine, Mars Odyssey. De grandes quantités de glace (d'eau glacée), avaient-elles affirmé, sont présentes dans le sous-sol de la planète, et à une très faible profondeur (moins d'un mètre), contrairement à ce que pensaient jusqu'ici les planétologues.

Joshua Bandfield et ses collègues ont étudié de façon exhaustive les six ans d'analyse du sol de Mars par le spectromètre de Mars Global Surveyor, TES (Thermal Emission Spectrometer). Dans ces données, l'équipe n'a trouvé aucune "signature" de carbonate dans les dépôts présents sur le sol de Mars (vu par MGS avec une résolution de quelque 2 km sur 2). L'instrument en a seulement détecté des traces dans la poussière de la planète, et encore de façon équivoque, de l'ordre de 2 à 5 %.

Les carbonates se constituent lors de la dissolution des minéraux et du dioxyde de carbone (CO2) dans les océans. L'existence par le passé de vastes étendues d'eau sur Mars aurait entraîné automatiquement la formation de grandes quantités de carbonates ; il n'y a donc pas eu de mers et d'océans à la surface de la "planète rouge".

Ces traces de carbonates, estiment les chercheurs américains, proviennent sans doute de l'atmosphère de Mars, et elles pourraient être en partie responsables de l'évolution de cette atmosphère et de son refroidissement, jusqu'à son état actuel : froide, ténue et sèche.