Bonjour à tous,

J'ai accueilli hier soir à l'apéro un ami avec qui j'étais parti en montagne fin août de cette année pour une partie de pêche en lac.
Nous avons évoqué ensemble, avec nos épouses respectives, cette sortie. Étonnamment, il est revenu en particulier sur une anecdote qui l'a particulièrement marqué alors que je l'avais pour ma part totalement oubliée. Je me permets de vous la raconter ici, sans preuve, sans photo, juste avec ma bonne foi.

Nous sommes donc partis de bon matin, à l'aube, pour un lac de montagne difficilement accessible (2324m d'altitude, +1450m de dénivelé). C'est une habitude que j'ai de rechercher le calme de la haute montagne pour profiter pleinement de la nature, loin de toute civilisation. L'ascension prend une bonne matinée de marche sur un pierrier plein sud assez raide et nous avions prévu un bivouac sur place le soir, avant de lever le camp le lendemain autour de midi pour rejoindre un autre lac d'altitude.

Bien entendu, nous avons croisé au cours de cette ascension quelques randonneurs aguerris, partis à la journée, mais la difficulté et l'éloignement du lac font qu'à partir de 15 heures environ, nous nous sommes retrouvés seuls au bord de l'eau. Le temps était clair, la visibilité excellente et la pêche mauvaise...
A l'approche de la nuit, nous avons installé le camp: allumer un petit feu, monter la tente, ranger tout ce qui peut attirer les animaux et nous nous sommes couchés.
Comme toujours en montagne, la nuit bruisse de tout un univers qu'on ne voit pas en journée, de pierres qui se décrochent et dévalent les radiers, de petits animaux attirés par les miettes du repas ou l'odeur des poissons, de gobages nocturnes que des truites taquines nous lancent comme un défi.
La nuit était aussi claire que la journée et l'éclat de la lune permettait, sans qu'elle ne soit pleine encore, d'avoir une bonne visibilité.
Vers 1h du matin, je fus réveillé par mon ami qui criait à l'extérieur de la tente. Pas un cri d'effroi, non, plutôt un appel lancé à pleins poumons et qui résonnait dans les vallées. Je sortis un peu précipitamment de la tente et le repérai très rapidement debout sur la crête à une quinzaine de mètres du bivouac. Je m'approchai en lui demandant ce qu'il se passait:
"Regarde! Là, en bas, il y a un type qui marche sur la sente avec un âne en tenant une sorte de lanterne! Tu trouves pas ça bizarre, en pleine nuit? Peut-être qu'il s'est perdu!"
Effectivement, 400 mètres plus bas environ, je distinguais une sorte de sentier à la lueur de la lune et sur lequel se déplaçait une masse qui aurait pu ressembler à un cheval au pas. Ce sentier n'était pas un chemin de randonnée. Il ne passait pas dans la vallée principale mais sinuait plutôt entre un versant abrupt (une paroi d'une cinquantaine de mètre située de notre côté d'observateurs) et un pierrier en pente prononcée de l'autre. Surtout, pour bien connaître cette vallée, il ne venait de nulle part mais semblait se diriger vers le plateau où se concentrent les chemins de randonnées et les belvédères touristiques.
Il y avait une forme supplémentaire, avec le cheval, un peu indistincte, qui aurait pu faire effectivement penser à une silhouette humaine en partie cachée par l'animal. Même à cette distance, on voyait qu'il ne s'agissait pas d'un fringuant équipage parti à la conquête des sommets. Le pas était lourd et continu; l'avancée lente et régulière. Mon ami appela à nouveau en faisant de grands signes, mais la forme continua son chemin comme si de rien n'était, sans marquer d'arrêt, sans dévier de sa route. Nous regardâmes cheminer l'étrange convoi quelques secondes, jusqu'à le voir disparaitre derrière les branches d'un pin à crochets poussé à mi-pente environ. Et alors que nous nous attendions à le voir réapparaitre sur la suite du chemin, il ne réapparut jamais.
Pour ma part, je n'ai pas vu de lumière. Néanmoins mon ami me dit que la personne était positionnée de l'autre côté de l'âne au moment où je suis arrivé, mais que lui, lorsqu'il était sorti pisser, avait bien vu un homme marcher devant l'animal en s'éclairant d'une sorte de lanterne qui n'éclairait pas au loin, mais qui faisait une tâche lumineuse juste sur le chemin. Que d'ailleurs, c'est ce qui avait attiré son regard de prime abord.
Le lendemain matin, je me levai persuadé d'avoir aperçu dans la nuit un cerf un peu égaré à l'étage subalpin et qui cherchait à retrouver ses forêts de l'étage inférieur, et j'oubliais cette aventure jusqu'à hier soir.
C'est donc hier que mon ami m'a fait part de l'impact qu'a eu sur lui cette vision et des recherches qu'il a entreprises depuis. Il s'avère ainsi qu'en effet, ce passage en direction du plateau fut découvert et utilisé par les réfugiés espagnols qui tentaient de rejoindre la France en traversant à pieds les Pyrénées. Complètement abandonné aujourd'hui, il a servi un temps à la contrebande. Il existe d'ailleurs une photo d'un contrebandier espagnol, en noir et blanc, qu'il s'est procuré et qui m'a laissée pantois lorsqu'il me l'a montrée sur son téléphone: c'est quand même très ressemblant avec ce que mon souvenir me rappelle de ce chemin sous la lune.
Pour mon ami, il n'y a pas de doute, nous avons aperçu cette nuit-là un fantôme, une image rémanente d'un temps révolu. Je suis bien obligé de reconnaitre que personne ne se serait promené à cet endroit-là, de nuit, sans torche, et qui plus est avec un âne. Je ne peux pas affirmer non plus qu'il s'agissait d'un animal (plus grand qu'un isard, pas la forme d'un ours, il n'aurait pu s'agir que d'un grand cerf), lequel aurait probablement pris la fuite lors de nos appels. Un humain, lui, aurait marqué un temps d'arrêt ou du moins essayé de répondre devant l'incongruité de la situation (pleine montagne, de nuit).
Alors, je ne sais pas... et je ne saurai jamais ce que nous avons vu cette nuit-là. Mon ami se dit sûr que si j'avais assisté à l'intégralité de la scène qu'il a vue, je serais de son avis.
Hier soir, il a fait naître le doute en moi, et je l'en remercie. L'anecdote devient sous cet éclairage une belle histoire que je prends plaisir à partager avec vous.

Merci de ce partage, c'est aussi très bien écrit, j'ai eu l'impression d'y avoir été ! j'ai entendu les truites gober de nuit

Si l'on est réceptif au paranormal, tout est possible néanmoins d'autres scénarios rationnels sont envisageables dont celui d'une personne qui ne voulait pas d'échanges avec vous pour diverses raisons qui lui étaient propres.

Cette personne aurait fait ce qu'il fallait pour ne pas en avoir; ensuite la démarche "diesel bas régime" existe bien en montagne, notamment des locaux d'un certain age, des bergers, des passeurs... plutôt des personnes qui sont dans la montagne a des fins utilitaires et mangent des heures et des heures de marche fréquemment et non pas l'approche des montagnards sportifs.

Plutôt qu"un âne je verrai plutôt une mule transportant de la charge, cet animal connait les chemins par cœur, il possède un réel GPS intégré et/ou une mémoire redoutable, il peut voyager de façon autonome à son rythme, un homme s'alignera sur sa vitesse et l'accompagnera et pas le contraire.

Le scénario du passeur/contrebandier avec sa mule de nuit n'est peut-être totalement à écarter, se dissimuler lors du passage derrière l'arbre...

Mais je n'y étais pas en fait, donc c'est juste une hypothèse.

Je tiens à préciser que j'ai vécu quelques événements que je ne peux pas expliquer et ne suis donc en aucun cas un donneur de leçon, c'est ce qui m'a amené ici, juste un passionné de ces sujets suite à mon vécu.