A ce sujet, je pense qu'il n'est pas inutile de préciser que l'expérience de Rosenhan s'inscrit dans la continuité directe du mouvement anti-psychiatrique dont les fondements ont commencé à émerger au début des années 60, pour s'étendre ensuite sur une grande partie de l'Europe. Concrètement, ce mouvement contestataire est assez représentatif d'une crise sociétale alors en pleine émergence que l'on pouvait observer à cette époque là.
Cela s'est notamment ressenti dans le domaine de la psychiatrie au travers d'une profonde remise en cause de ce que l'on traduit communément par le terme de "folie". La prise en charge de la schizophrénie n'a pas échappé à la règle. C'est tout le système institutionnel qui a été pointé du doigt, et en particulier les fameuses nomenclatures utilisées pour identifier les pathologies en uniformisant leur définition. En voulant reprocher aux soignants de stigmatiser les malades en les catégorisant de façon peu adaptée, c'est du coup la pratique soignante elle-même qui est devenue stigmatisée. Alors comment se positionner ?...
Je pense que l'on oublie trop souvent de rappeler que la psychiatrie a su évoluer et s'adapter depuis Philippe Pinel et Benjamin Rush, à une époque encore pas si lointaine où l'on considérait que la maladie mentale était systématiquement associée à l'oeuvre du Démon. Mais il reste encore beaucoup de progrès à faire, dans de nombreux domaines...
L'étude de Rosenhan offre une piste de réflexion intéressante, mais encore faut-il la considérer dans sa globalité, et pas seulement au hasard de quelques liens pêchés sur le net
Dans une grande majorité des cas, le manque de disponibilité du personnel avait par exemple clairement été mis en évidence. Avec une moyenne de six minutes par jour consacrées aux patients, je comprends que les erreurs de perception et de diagnostic aient été légion... Une étude comparative réalisée dans des conditions de prise en charge optimale aurait vraisemblablement offert un résultat différent.
Encore une fois je pense que cette expérience doit surtout amener à comprendre et à déterminer les dysfonctionnements qui existent dans certaines unités de soin, et dont j'ai moi-même parfois été témoin dans la prise en charge des patients. La gestion de la maladie, de l'évolution de ses symptômes est un challenge au quotidien qui demande beaucoup de temps et de moyens. Mais au delà de la pathologie, c'est aussi de l'humain dont il faut tenir compte. La question de l'éthique dans le cadre du soin reste une problématique à part entière qui nécessite de trouver le juste équilibre.